vendredi 4 avril 2014

Pour contrer la violence: un dessin «réparateur» ?

Il y a quelques jours, JeuneHomme a dû rester à l'intérieur durant la récréation pour faire un dessin «réparateur». Si vous vous demandez ce qu'est un dessin réparateur, c'est que cette technique de résolution de conflits n'est pas en vigueur dans votre école. Et c'est presque tant mieux... quoique j'aimerais savoir comment les conflits sont résolus, aussi.

Ce que j'ai su c'est que JeuneHomme s'amusait dans la cour d'école avec ses amis quand d'autres (dont un en particulier!) sont venus les agacer. Les autres ne voulaient pas partir et JeuneHomme s'est fait pousser par terre et donné un coup de pied dans le ventre par un autre. Par terre, il a essayé de lui faire une jambette.

Conclusion de l'école: les deux ont usé de violence, les deux doivent s'excuser et les deux doivent rester faire un dessin «réparateur» à la récréation suivante.

Ça me laisse perplexe. On s'entend. Je n'encourage pas la violence. Je serais la première à donner une deuxième conséquence et faire une longue remontrance à JeuneHomme si j'apprenais par l'école qu'il a été violent ou pire qu'il a blessé quelqu'un. C'est inacceptable de choisir la violence pour se faire entendre.


Mais n'y a-t-il pas une différence entre un geste d'attaque et un geste de défense? C'est là que je me questionne. Je ne peux pas comme mère lui dire de se laisser faire non plus. Autrement, s'il ne réplique pas, j'ai comme la douloureuse impression que les autres pourraient en profiter... Ou pire, que ça fasse en sorte que JeuneHomme se désintéresse de l'école et n'aime plus y aller. Ça, on s'entend que ce serait un vrai drame. On veut faire en sorte que les gars aiment l'école et qu'ils ne décrochent pas. Il faudrait les aider aussi. 


C'est vraiment juste un double dessin réparateur, la même conséquence si tu as commencé que si tu as répliqué? Je ne crois pas. Le geste de défense est aussi grave que le geste d'attaque? Non! Mais on est tellement dans une culture de "tout le monde pareil", "faut pas brimer trop" ou "faut que ce soit juste" qu'on en vient à ne pas véritablement agir. Un enfant fait mal à  un autre; il doit faire un dessin «réparateur». La victime se défend, elle doit faire aussi un dessin «réparateur». Quel est véritablement le message que l’on envoie à nos jeunes? Tu peux commencer à tabasser un autre, pas grave, tu vas faire un dessin et ta victime aussi...  

Comprenez-moi bien, je ne suis pas contre les punitions. Bon, entre vous et moi,  les dessins, je trouve ça assez insignifiants. On s'entend que je ne suis pas certaine que les enfants comprennent la gravité de leurs actes en faisant un truc qu'ils font tous les jours: dessiner.  Ce qui me fait un peu peur, je dois l'avouer, c'est que JeuneHomme ne garde pas le bon message. Apparemment, il s'est bien expliqué («bien verbalisé» qu'on dit en jargon scolaire!) devant l'autre garçon et le professeur, mais il n'a pas été compris ni cru. Alors, un moment donné, il va peut-être juste se taire. Et qui, sait, commencer... et frapper en premier!

La solution? Je ne la connais pas.  Je sais que JeuneHomme a assumé son geste. Il n'a pas eu le choix. Moi, c'est le message que j'essaie de lui inculquer. Toutefois, en-dedans de moi, je trouve ça injuste. L'autre petit garçon n'aurait pas eu une jambette s'il n'était pas venu pousser JeuneHomme. Un moment donné, faut trouver des coupables et leur signifier clairement que leurs agissements n'ont pas d'allure (ça me fait penser aux élections, tiens! Il y en aurait une maudite gang qui ferait des dessins «réparateurs»). Ils ne peuvent pas toujours s'en tirer aussi facilement... On ne peut pas se laisser faire! Tout le monde n'est pas coupable. Il y en a toujours un plus que l'autre. Oui, ça demande du jugement! Mais pour que ça arrête, faut sévir... pour vrai! Il y a différents niveaux de violence, il y a différents actes et selon moi, il y a différentes conséquences. Un dessin pour tous? Franchement!

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8 commentaires:

lespiegle a dit…

Je vais me faire lancer des tomates mais c'est Parce que les écoles ces rendu juste une affaire de filles il y a juste des enseignantes donc les garçons devraient agir comme des filles.

Gen a dit…

On est dans une culture de "il ne faut pas utiliser de violence, jamais, jamais", ce que je trouve complètement ridicule.

De nos jours, tu peux insulter ton prochain et l'intimider tant que tu veux, l'école ne sévira pas. Mais lève pas la main pour te défendre par exemple. Là tu seras aussi coupable que ton agresseur. Encore plus coupable, même, si l'agresseur a eu la bonne idée de t'attaquer uniquement sur les réseaux sociaux en détruisant sournoisement ta réputation.

JeuneHomme s'est défendu, avec une force proportionnelle à l'attaque reçue. Tant qu'à moi, c'est parfait.

Vous pouvez toujours lui expliquer que l'école ne peut pas faire de différence, que eux ils ne le connaissent pas aussi bien que vous, mais que vous, vous le croyez et ne le punirez JAMAIS si vous apprenez qu'il s'est DÉFENDU.
Mais que vous n'accepterez jamais d'apprendre qu'il a frappé le premier.

Pour ce qui est du dessin réparateur demandé par l'école... Je trouve que c'est une punition ridicule pour l'agresseur, mais au moins elle ne brime pas trop l'agressé puni en même temps.

GeSirois a dit…

Je suis d'accord avec toi. Pour moi, ce défendre, ce n'est pas comme attaquer. Je ne leur ferai jamais d'énormes félicitations mais jamais je ne blâmerai mes enfants de s'être défendu. Non, je ne veux pas encourager la ville ce mais je les encourage encore moi à se laisser écraser par les autres.

Anonyme a dit…

L'autre jour, au service de garde, mon fils qui est particulièrement en forme et de bonne humeur, croise un de ses amis et le brasse un peu par les épaules en guise de "je t'aime" version masculine. Une éducatrice le surprend et lui impose le fameux dessin réparateur. Je comprends que l'éducatrice ne peut pas toujours bien évaluer les gestes posés, mais j'ai du gérer une crise de "j'haïs l'école X 10" en revenant à la maison. Je suis donc un peu d'accord avec lespiegle : à l'école, on comprend très peu le comportement et l'agressivité des garçons et on y fait face avec des réflexes féminins.

Anonyme a dit…

En principe je suis tellement d'accord! C'est effectivement aberrant de punir la personne qui se défend.

La seule difficulté, en pratique, c'est qu'il arrive très souvent que la version des faits des enfants impliqués ne coïncident pas du tout (pas tous les enfants avouent écœurer pour le fun ou frapper gratuitement!), et ils ne s'organisent pas tout le temps pour se battre devant témoin professoral... parfois la situation est assez évidente (par exemple un enfant qui se fait systématiquement intimider), mais parfois c'est beaucoup plus embêtant (par exemple lors de jeux plus "masculins" décrits dans des commentaires précédents qui finissent par mal virer, deux jeunes qui se détestent à qui mieux-mieux depuis toujours...)

Anonyme a dit…

Je suis d'accord avec le principe, mais la réalité c'est que ça peut devenir problématique dans une cour d'école d'enquêter pour déterminer qui a commencé quoi... avec le risque que le mauvais ti-cul soit puni s'il est moins bon à expliquer les faits ou s'il a moins d'amis que l'autre pour appuyer sa version des faits. D'où la politique violence zéro... je ne suis pas pour, je ne suis pas contre. C'est une solution imparfaite parce qu'il n'y a pas de solutions parfaites. Disons que quand ma fille a une baboune dans son agenda parce qu'elle a poussé un ami, je n'en fais pas un cas... je sais que ma fille ne se laisse pas marcher sur les pieds... Assume ta "baboune" ma fille, et NE POUSSE jamais la première.

J'ai un ami qui a un garçon (maintenant jeune adulte) qui était un peu différent. Très très très intelligent, mais aussi très timide, introverti, dans la lune. Pas très bons dans les sports, évidement. Bref, la cible parfaite pour les taquineries dans la cour d'école. Quand il allait voir la maîtresse parce que quelqu'un l'avait bousculé ou tapé, celle-ci n'avait jamais rien vu. Comme il avait peu d'amis, il n'avait personne pour témoigner de sa version des faits. Le soir il rentrait à la maison et contait ça à ses parents. Les parents ont essayé d'intervenir auprès de l'école... ça n'a rien donné. Alors mon collègue a dit à son fils de se défendre... de ne pas se laisser faire, de répliquer avec des coups si nécessaire... MAIS de ne jamais taper le premier. JAMAIS. Son garçon lui a dit "mais papa, je vais avoir un billet". "Si tu as un billet on va l'encadrer, ça sera comme un trophé". Il s'est défendu, il a eu un billet et ils l'ont encadré et accroché au mur de sa chambre. Et les "amis" ont fini par lui foutre la paix dans la cour d'école.

Une autre histoire du genre... à 10 ans j'attends l'autobus avec 7-8 enfants de la rue. Y'en a une qui m'écoeurre tout le temps... depuis des semaines. Des mots blessants, des rumeurs sur moi, elle me cherche tout le temps, rit de mes cheveux, de mes vêtements, de ma famille, de moi et de tout ce qui me touche, bref. Les autres embarquent... attendre l'autobus est rendu vraiment le moment désagréable de ma journée. À cette époque là, les parents ne sortaient pas attendre l'autobus avec les enfants... Bref, un beau matin d'hiver, j'en ai assez. Deux fils se touchent. J'accroche la petite criss par le collet et je lui pousse la face dans le banc de neige. L'autobus arrive. La fillette pleure a chaud de larme et elle a de la neige dans le cou. Le chauffeur demande des explications... Ils sont 7-8 à dire que j'ai "sauvagement" aggressé la fille sans aucune raison. Je suis envoyée chez le directeur en arrivant à l'école. Je donne ma version des faits. Il écoute (ce qui est déjà beaucoup) et se montre compréhensif, mais la règle c'est la règle... la violence n'est pas la solution. Je dois faire mes excuses à la fille et j'ai une copie à faire à la maison... Oui, les excuses me sont restés dans la gorge un bout de temps... mais j'ai quand même pu dire à cette petite voisine, en privé, que j'avais la ferme intention de récidiver à n'importe quel moment... Tu m'écoeurres encore et tu auras ce que tu mérites. Elle a fait un peu sa fraîche au début, mais elle a slaqué sur les mots blessants... Je n'ai jamais eu à lui remettre la face dans le banc de neige.

Ce que je retiens de tout ça? À l'école comme dans la vie les règles ne sont pas toutes "justes". Suis les règles quand tu le peux, enfreins-les si c'est ce qui doit être fait et accepte les conséquences qui viennent avec. C'est le prix à payer pour être capable se respecter soi-même. Et ça, c'est pas la société ni l'école qui va le faire à notre place.

Anonyme a dit…

J'ai déjà vu des élèves de 5 année être simplement puni par "dessin réparateur" après avoir menacé au beurre d'arachides un autre élève hautement allergique à la chose. "On va te tuer!" qu'ils lui ont crié en lui courant après dans la cour d'école avec ce qui était du poison pour lui. Punition de l'école :"Vous allez tous faire un dessin pour dire à Untel que vous l'aimez". Pas besoin de vous dire que la mère a sorti son enfant de l'école après ça.

Lillymax a dit…

On est dans l'ère du "no fault". Je suis contre. Totalement.
Faire un dessin? Ben voyons donc....
RI-DI-CU-LE!!!
Je seconde totalement Gen dans son message!
L'école n'est pas une affaire de filles, l'école c'est FAIT pour les filles, c'est différent!