mardi 22 mars 2016

Le plaisir est-il suspect?

(discussion autour d'une cour d'école rapportée par une amie)

En attendant ses enfants près de la cour d'école, une amie à moi discute avec un groupe de mamans. Tout ce qui a de plus simple. Un jeudi soir comme tant d'autres. Puis, elle s'adresse à l'une d'entre elles qu'elle voit plus souvent :
- «Ce soir, on prends-tu un verre? Ça ferait du bien!».
- «Bonne idée!», que son amie lui répond.

Et là, les autres s'en mêlent. Pas parce qu'elles voulaient y aller elle-aussi. Nenon!

- «Chut! Dites-le pas trop fort, les enfants s'en viennent!»
- «Un jeudi soir? Vraiment?»
- «Faut pas fêter trop, vous savez «à notre âge», c'est pas facile, le lendemain!».

Et tout ça, avec des airs de «ben voyons donc!», «pfft, franchement! C'est futile!», etc.

Euh??

On comprend vite pourquoi mon amie n'est pas «amie» justement avec les autres. Quoi, on n'a pas le droit d'inviter une amie un jeudi soir pour prendre un verre? On devrait le faire «en cachette» des enfants? On devrait pas dire trop fort qu'on se fait plaisir? Et on ne parle pas d'inviter quelqu'un à une beuverie, là! Non, un verre, tranquillement, pendant que les enfants jouent. Un verre pour décompresser. Un verre comme mille prétextes pour se jaser, pour prendre du temps, pour lâcher prise, etc.

Il n'y a pas un enfant qui va être perturber si la routine du soir est chamboulée parce qu'on invite une amie pour un 5 à 7 improvisé. Je suis même plutôt d'avis que les  enfants ont tout à gagner de voir le vrai côté de leurs parents. Ils ont besoin de les voir vivre des hauts et des bas (sans essayer d'édulcorer les moments difficiles en inventant un monde de Calinours perpétuel) et prendre du temps pour eux en s'accordant des moments plaisants qui les rendent plus de bonne humeur 

Comment (et pourquoi!) le plaisir est-il devenu suspect? Et ça, en plus, d'être toujours relié à une idée de culpabilité. J'haïs cette expression «plaisir coupable». Franchement. Ça enlève toute la saveur au plaisir, non?

Bref, faisant fi des remarques des autres, mon amie et la sienne ont pris un verre ce soir-là. Et bien d'autres jeudis soirs aussi (et quelques mardis et mercredis à l'occasion). Et surtout, elles ont continué à le dire, sans gêne. Parce que personne ne devrait être gêné de ça! 

Le pire, selon mon amie, les autres mamans auraient tout autant capoté si elle avait offert de prendre un café ou un thé. «C'est le principe même de prendre du temps pour soi, l'annoncer, le dire tout haut, qui les grafigne!». Fou de même!




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