mardi 18 avril 2017

La chasse aux «faucons»: notre (seul) sport préféré

Ahhh la chasse aux faucons! Quelle activité plaisante! En fait, c'est notre (seul) sport préféré.

Aaaaah les listes de choses à faire! Vous en avez, on est certaines. Sans elles, on serait plus que perdues  (désorganisées, Alzheimer, dans un trou noir…) mais le problème, c’est qu’elles ne viennent jamais seules. Non, elles se déclinent en un paquet de listes d’obligations plates... Attendez, prenez une gorgée et lisez. Vous allez comprendre qu’elles sont les listes nocives qu’on doit éliminer de nos vies…

--- Il y a la liste des choses qu’il faut qu’on fasse absolument cette année (généralement, elle contient la moitié des choses qu’on a finies par ne pas faire l’année précédente).
--- Il y a la liste de choses qu’il faut qu’on fasse durant la semaine (faut qu’on aille à la rencontre de parents, faut qu’on aille faire le changement d’huile au garage, faut qu’on emmène le plus petit chez le coiffeur).
--- Celle des choses à faire le weekend (nos deux seuls mini-jours de «congé »!) qui contient toujours quelques transferts de la semaine (faut qu’on aille au cours de natation, faut qu’on aille à la pharmacie, faut qu’on fasse une grosse épicerie avec plein de collations en réserve, faut qu’on aille acheter des nouveaux souliers pour l’édu, faut qu’on passe voir les beaux-parents, faut qu’on emmène vraiment le plus petit chez le dentiste).
On est tellement occupés avec les obligations de gestion de la vie quotidienne qu’on finit par se sentir coupables de faillir à nos obligations de base en tant que parent et là, ça repart : faut qu’on lise plus souvent d’histoires au plus petit, faut qu’on fasse plus de sport avec le plus grand, faut qu’on apprenne à cuisiner aux enfants, faut qu’on arrête d’être trop parents-poules, faut qu’on inscrive les enfants à des cours de skis/danse/théâtre/piano/natation, faut qu’on pratique plus souvent les tables de multiplication, faut qu’on bricole plus avec les enfants (la liste est in-fi-nie!).

Sans compter les obligations domestiques… Faut qu’on lave les fenêtres, faut qu’on repeinture le salon, faut qu’on transfert le plus petit dans un lit, faut qu’on répare la clôture, faut qu’on achète un deuxième frigo, faut qu’on débouche le bain (la liste est encore plus infinie!).
Tous ces «faucons» nous créent des stress inutiles et font spinner notre hamster jour et nuit. On reporte nos tâches imposées de liste en liste et on vit de la frustration à force de ne rien rayer. Faut qu’on passe à travers notre liste! (et un stress de plus!) Mais ce n’est pas tant la liste le problème (sans elle, on n’en finirait plus de se répéter nos «faucons» pour ne rien oublier), le vrai problème, c’est le manque de temps. Celui qu’on se crée nous-mêmes en surchargeant notre agenda à la limite de l’humainement possible. Et puis, quand on dit un «faucon», on est bien loin de «j'ai envie de...». On se crée des obligations, on se rajoute des trucs sur notre liste, on se stresse. Bien sûr, certains faucons sont inévitables. Mais on s'en débarrasse le plus vite possible. On trouve des façons de tourner quelques coins ronds (oui, c'est possible!). On délègue (sans jeter un oeil sur la manière que c'est fait!). On se donne une limite: on fait un blitz de ménage entre 10h et 11h samedi matin et on n'en parle plus après (autrement, on laisse le faucon trainé et il perturbe tout notre weekend! Vaut mieux circonscrire notre faucon dans un temps limité!). On le double d'un bonheur bien mérité («On va à ce rendez-vous à la banque qui ne nous tente pas, mais au retour, on arrête se chercher un bon café!». Eh oui, les récompenses, ça marche aussi pour nous!!). 
On se crée des obligations: faut qu’on mange deux sortes de légumes à chaque repas, faut qu’on fasse des purées maison, faut qu’on joue à des jeux éducatifs avec les enfants, faut qu’on fasse une longue promenade chaque jour en poussette, faut qu’on habille les enfants avec des kits différents ET qui matchent chaque jour pour la garderie… Mais tout ça, est-ce vraiment indispensable quand ça déborde de tous bords tous côtés? On voudrait tout faire alors qu’au contraire il faudrait chercher à éliminer le superflu (et c’était une belle liste de superflu ça!).
On a des enfants, normal qu’on n’arrive plus à tout faire aussi bien, rapidement, parfaitement qu’avant. Mais c’est désormais ça notre plus grande obligation. Le reste, c’est… le reste! Concentrons-nous sur l’essentiel et rayons définitivement de la liste ce qu’on n’arrive jamais à faire (c’est  la technique dite du blocage mental. Ça existe? Non? Inventons-la!).
On se met tellement de pression! Ce n’est pas pour rien qu’il faut qu’on pense à soi, faut qu’on se trouve une gardienne fiable, faut qu’on passe plus de temps en couple, faut qu’on trouve le moyen de décrocher, faut qu’on inscrive déjà les enfants au camp de jour, faut qu’on réserve les vacances d’été !
Ah oui, des vacances… parce qu’il faut qu’on relaxe, un jour!

(Z)e liste des oiseaux de malheur à chasser :
Faut qu’on stimule son enfant à chaque seconde.
Faut qu’on fasse du jogging, tout le monde en fait.
Faut qu’on soit des parents patients qui ne perdent jamais leur calme.
Faut qu’on regarde moins la télé.
Faut qu’on soit des amants passionnés tous les jours avec une vie sexuelle torride.
Faut qu’on soit toujours disponibles pour le travail.
Faut qu’on cuisine des repas sains et équilibrés chaque jour.
Faut qu’on visite la famille plus souvent.
Faut qu’on lave le frigo/le four/les fenêtres/les draps…
Faut qu’on coupe le gazon/les fleurs/les cheveux des enfants…
Faut qu’on ramasse le garage.
Faut qu’on organise une fête pour la simili-ado avec ses 8 amies.
Faut qu’on court les « spéciaux » à l’épicerie.
Faut qu’on essaie une nouvelle recette chaque semaine.
Faut qu’on redécore la cour.

mercredi 12 avril 2017

Comment être des parents ordinaires?

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On ne veut pas péter votre bulle, mais les enfants (les vôtres et les nôtres!) sont extraordinaires! (et c’est tant mieux!)

Pourtant, vous en êtes certaine d'avoir accouché d’un génie! Vous en êtes persuadée. Plus le temps file, plus vous en êtes certaine. Vous étalez ses prouesses (des plus insignifiantes aux plus étonnantes) partout : vous compilez des données dans le livre de bébé, vous inondez votre mur Facebook de chacune de ses expériences et étalez son savoir, vous l’inscrivez à 8 cours différents par année pour le stimuler sans relâche, vous faites avec lui d’innombrables bricolages compliqués (votre armoire ressemble à l’entrepôt brico du Dollorama), vous le félicitez pour tout (et sûrement pour rien!). Vous pensez avoir un enfant exceptionnel, c’est normal : vous êtes sa mère. Mais sachez-le bien : votre enfant est ordinaire.

Oh! Ordinaire : le mot vous choque peut-être. Vous avez fait un énorme «pppffft» en disant «Ben, voyons, elles ne connaissent pas MON enfant!» (avec un p’tit air plein de dédain envers nous et notre analyse de bas étage!). Détrompez-vous : c’est génial d’avoir des enfants ordinaires. On ne nivèle pas du tout vers le bas. On vit juste chaque chose en son temps. Et c’est ce qui cloche justement dans la parentalité de nos jours : on veut tout vivre vite, prévoir pour plus tard et s’inquiéter de demain. On a donc besoin de se calmer le gros nerf.

Tous les parents veulent le mieux pour leur enfant, c’est bien normal. Mais est-ce une raison de virer complètement fou avec l’obsession du génie? Il y a des enfants de trois qui apprennent trois langues, sont inscrits à des cours de chant privé à trois ans (riez pas, on a déjà eu à subir le numéro de l’enfant supposément prodige dans un spectacle de fin d’année d’un école de danse-théâtre-musique), sont poussés à patiner… avec leur couche et qui savent écrire tout leur alphabet (et le récite dans les trois langues, évidemment!).

Nos enfants, à trois ans, ils jouaient avec une fausse cuisinière, nous faisaient goûter des fausses pizzas, improvisaient un spectacle de marionnettes, jouaient aux parents avec une flopée de poupées et créaient des bonhommes en pâte à modeler.  Ils s'amusaient comme des enfants de 3 ans. Aujourd'hui, ils savent tous lire, écrire, additionner, multiplier, etc. Ils ne sont pas extraordinaires, mais ils sont eux. Et ça, ça veut dire beaucoup aussi. Ils sont ce qu’ils veulent être. Pas ce qu’on veut qu’ils soient.

L’obsession du génie est d’abord une obsession parentale, un désir qu’on avoue pas de réparer ce qu’on a vécu, colmater un manque ou offrir qu’on n’a jamais eu. Un professeur américain – David McCullough Jr – a écrit un véritable plaidoyer anti-performance. Le titre de son livre : You Are NOT Special. Il s’est inspiré d’un discours qu’il a prononcé à la remise des diplômes de ses étudiants en 2012 dans lequel il les encourage à oser vivre des expériences par eux-mêmes, de suivre leurs intérêts sans rechercher la récompense matérielle, la reconnaissance des pairs, une note sur un examen ou une médaille, non juste pour le feeling que ça procure de faire quelque chose par réelle passion. Le plaisir avant le résultat? C’est un bon principe non?

Pousser nos enfants à devenir des êtres d'exception? Non merci! On clame le retour des enfants-enfants! Ceux qui jouent, qui essaient, qui brisent des trucs, qui osent, qui inventent et qui s’ennuient. Parce que s’ennuyer, c’est avoir de l’espace pour rêver! À vouloir qu’ils soient extraordinaires, on les empêche d’avoir tout simplement du fun. Dépoussiérez vos souvenirs : vous aimiez jouer au ballon-chasseur à l’école, vous vous rappelez le plaisir que vous aviez à jouer, mais vous vous rappelez vraiment des résultats?  Vous vous souvenez du plaisir à monter une pièce de théâtre avec votre classe en 5e année, mais vous rappelez-vous de votre note reçue? 

À bas la pression à exceller, à performer, à se démarquer, à sortir du lot, à être exceptionnel ou «spécial» à tout prix. Elle empêche les jeunes de prendre des chances, des risques, d'oser, de penser et d'agir par eux-même, etc. Et si on redonnait un peu de liberté aux enfants avant  de suivre ses rêves, de faire quelque chose qui le fasse vibrer, de faire des choses petites, mais qui l'aident à se trouver, à se connaître, à s'aimer, à aimer, etc.   

Les enfants ordinaires ont du plaisir et des souvenirs tandis que les enfants extraordinaires ont des «satisfactions» et des résultats.


Comment être des parents ordinaires?
  • Dire «oui» quand notre enfant veut essayer de faire un gâteau tout seul.
  • Laisser ses enfants s’ennuyer en répondant «je ne sais pas moi non plus » à un «Qu’est-ce que je pourrais bien faire?».
  • Arrêter les cours parascolaires pour 6 mois… un an… toujours?
  • Laisser les enfants jouer dehors