lundi 28 juillet 2014

Le moment présent (et la méthode «j'sais pas»)

Depuis quelques années, je m'efforce d'inculquer une notion (qui semble malheureusement en voie d'extinction) à mes enfants: le moment présent, cet espace-temps mal aimé situé entre l'avant et le tantôt.

«Ici, maintenant» est devenu un cheval de bataille parental chez nous, devant notre trio drillé à la garderie qui veut toujours savoir ce qui vient après.

Exemple trop souvent entendu chez nous et qu'on ne supporte plus:

- Les enfants, cet après-midi, on s'en va au cinéma.

- Yééé! On fait quoi après?

- (soupir intense)

La seule réponse valable que nous avons trouvé à cette question 100 fois posée dans une journée c'est: «j'sais pas» . On leur répond systématiquement ça chaque fois. Parce que de toute façon, on a beau s'être établit un plan de la journée, on sait pertinemment qu'on ne le respectera pas (fera plus beau, ça nous tentera plus, va y avoir trop de trafic, whatever).

Et grâce à notre méthode «j'sais pas», on a réussi a calmé le besoin vital de savoir l'ordre du jour de notre TED angoissé. Depuis que Lolo est petit (et diagnostiqué!), on nous a dit de faire des schémas, des diagrammes, des tableaux et des courbettes pour l'aider avec sa rigidité organisationnelle (fréquent chez les TED). Eh bien, sachez éminents spécialistes qu'il est moins angoissé en ne sachant pas ce qui s'en vient trop à l'avance (il n'a pas le temps de se le répéter et de le retourner 1000 fois dans sa tête et s'y perdre en deux angoisses) et que «j'sais pas» est une réponse suffisamment explicite pour être une case mentale où ranger son plan du jour... en attendant de connaître la suite.

Parce qu'en ne sachant pas ce qui vient après, pas le choix de le vivre le foutu moment présent! (c'est simple, hein?!)

Mais, bonne nouvelle, ce n'est pas que l'apanage des enfants «dompés à la garderie»! Grand nombre d'adultes sont atteints du même mal. Au show de Bruno Mars la semaine dernière, Momo me donne un coup de coude en me montrant avec sa face de préado découragée les gens qui descendent l'escalier pour quitter le spectacle... AVANT LA FIN de la dernière toune AVANT le rappel. «Eux autres, ile ne le vivent pas, hein, leur moment présent?!»

En effet, en quoi il est plus important de partir avant le rush (et avant le meilleur moment d'un show) quand tu t'es déplacé pour aller voir un spectacle? À quel point dois-tu partir dans les plus brefs délais? Qu'est-ce qui t'attend de si urgent? (sauver 10$ de gardienne?) Même chose à La Ronde, lors des feux d'artifices, ça se lève et ça quitte les estrades avant la finale. Euh... pourquoi? Prends ton temps, profite du privilège que tu as d'être là. Ici et maintenant. Tu vas arriver chez vous de toute façon.

P.S.: Je vous remercie les stressés qui donnez des leçons de vie à mes enfants au quotidien. Si une image vaut 1000 mots, une situation qui se passe sous leurs yeux en vaut 100 000.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Mes enfants sont plus jeunes... mais moi, ce qui me fait rager, ce n'est pas tant le "après" qu'ils veulent connaître que le petit "plus" qu'ils veulent toujours. Rien n'est jamais "assez".

Je leur offre de la crème glacée pour dessert? Ils veulent avoir un biscuit avec ça.

On fait une activité en famille qui sort un peu de l'ordinaire? Ils veulent aussi manger au resto... ou alors réclament une "surprise" dans l'auto...

On va magasiner des vêtements et des souliers neufs? Ils veulent des bonbons ou des jouets en plus.

Bref, peu importe l'occasion, ils trouvent le moyen d'être déçus de ne pas avoir eu l'affaire qu'ils ont trouvé le moyen de demander en plus du reste. Ça me rend folle. Mon défi, c'est de leur apprendre à apprécier ce qu'ils ont déjà, à ne pas toujours vouloir plussss... parce que plusssss n'a pas de fin. Vouloir toujours plusssss, c'est l'insastifaction chronique garantie.
On va au cinéma

Anonyme a dit…

J'avais (et j'ai toujours) cette même exaspération du "toujours plus", jusqu’au jour où mon chum ( qui a souvent raison de ce côté là grr...) constate "Mais tu es exactement pareille". Pan dans les dents. Et force est de constater qu'il n'a pas tort... Du coup non seulement j'essaye de l'enseigner à mes enfants - mais j'essaye de l'appliquer directement à moi-même !!

Une femme libre a dit…

Le "ici maintenant" est une grande leçon de vie. Plus difficile que ça en a l'air. Tant mieux si vos enfants y sont initiés tôt.

Anonyme a dit…

Bravo chers parents d'assayer d'amener vos mousses à vivre le moment présent sans chercher à tout planifier d'avance et à savoir ce qui vient ensuite. Et, bravo également pour ce souci de briser cette manie d'en vouloir toujours plus! Je suis enseignante de 5e année (élèves de 10-11 ans) et je ne compte plus les fois où des élèves viennent me voir lorsque je surveille dans la cour pour me demander ce qu'on fera après la récré... Heille! Va jouer! Et, je ne vous raconte pas toutes ces fois où j'ai offert, plus souvent qu'autrement de ma poche, des surprises et/ou des privilèges et recueilli au passage des commentaires du genre "j'aurais aimé mieux telle chose!" ou "juste ça!?"... La plus belle chose que l'on puisse léguer à nos enfants, c'est bien de profiter du moment présent, d'apprécier les attentions d'autrui et d'être reconnaissant!