vendredi 11 mars 2011

Le dire



Probablement que vous avez déjà toutes eu des mots pris dans la gorge. Des chagrins, des peines, du ressentiment, de la colère, de la honte, une peur, un drame, un lourd secret.

Et c'est difficile. On n'ose pas souvent dire ce qui se passe. On a mille excuses, on ne trouve pas les mots, on ne sait plus comment s'y prendre ni par où commencer. On le sait bien que ça nous ferait du bien de ventiler, mais on n'y arrive juste pas.

Puis, un jour, on a trop besoin de dire et on laisse finalement couler les mots. Ça sortira comme ça sortira et tant pis! C'est plus fort que tout, il faut DIRE. Parfois, c'est pour se libérer, pour que ça sorte. D'autres fois, c'est pour faire un pas vers l'avant, pour enfin pouvoir passer à autre chose. Parfois, c'est un désir d'authenticité. D'autre fois, c'est pour arriver à faire la paix avec un bout de soi.

Chez les (Z), on a souvent raconté des bouts de notre vie (tout le temps, en fait!). Avec ses hauts et ses bas. Nos convictions et nos doutes. Nos bonheurs et nos peurs. Franchement. Honnêtement. Il y a quelques jours, on a réexpliqué à des gens les débuts du blogue et pourquoi on a voulu bloguer. La seule réponse qui nous vient et celle en fait qui résume le tout: pour dire les vraies affaires. Les dire simplement. On a montré notre vie, ouvert les portes de nos maisons. Et parce qu'on «disait», plusieurs se sont mis à nous écrire ou commenter nos messages simplement pour se raconter aussi. Pour se soulager. Pour dire... finalement.

Ces jours-ci - c'est un drôle d'hasard - sur des textes très très bouleversants écrits par des filles qui ont eu besoin de dire. Des filles que je connais presqu'exclusivement que par les mots qu'elles signent dans les magazines ou sur les pages de leur blogue.

Un premier texte: celui de Mamanbooh! qui, un lundi soir, vient décharger sa peine en nous confiant J'ai mal à ma mère. Une maman si positive qui, un soir, en a trop et qui le dit. Mais qui trouve le moyen de tourner le tout en quelque chose de lumineux...

Le deuxième: celui de Marâtre joyeuse qui nous raconte qu'elle est en pleine dépression post-partum, un sujet ultra tabou encore en 2011. Avec franchise. Pas un texte où elle s'apitoie sur son sort, un texte qui dit simplement ce qui en est et comment elle va.

Le troisième texte: celui d'Anne-Marie Lecompte dans le dernier Châtelaine (avril 2011) qui s'intitule Parti sans bruit. Disons que c'est un texte que tu lis, totalement captive. Bouleversant, touchant, renversant. D'un côté, celle qui écrit depuis 7 ans dans le Châtelaine - et qui habituellement rigolote avec son Raoul et les deux enfants - a ouvert encore un peu plus grand sa vie. Et on sent devant l'histoire du suicide de son garçon de 16 ans toute sa peine, mais aussi son désir d'être une bonne maman. «Mon coeur fou persiste à croire que j'aurais pu mieux m'y prendre avec lui. Et plutôt que de culpabilité, je parlerai de responsabilité.» Elle a pris parole pour l'espoir aussi. L'espoir à donner aux jeunes que personne ne refera plus ce geste. Aussi, elle termine en nous implorant de consolez nos enfants avant de les punir et de les regarder avec attention chaque jour. D'arrêter ce qu'on faire et de les observer simplement. Pour nous, pour eux, pour elle.

Et vous en avez probablement d'autres en tête (lesquels, dites-nous!!). J'en oublie sûrement moi-aussi. Toutes ces prises de paroles ont le même effet et c'est tant mieux. Elles nous font réfléchir et nous incitent, sans le savoir vraiment, à dire nous aussi. À ne plus cacher nos mots. À ne plus rester emprisonnée avec ces petits poids de lettres sur le coeur... Alors, allez mesdames! La parole est à vous!

15 commentaires:

Chantal a dit…

Je veux dire BRAVO à ces mères et autres qui le font aussi de parler haut et fort de ce qu'elles vivent. Je suis de celle qui pense qu'on en parlont, on va finir par faire baisser les tabous.

Je n'ai pas la chance d'être mère encore, mais je travaille à faire baisser les tabous entourant la santé mentale et le suicide. J'en parle très ouvertement sur mon blog. Je parle de ma maladie, le trouble de la personnalité limite et de ma thérapie pour essayer de m'en sortir.

Bravo pour votre blog.

Chantal
www.niny1.blogspot.com

Anonyme a dit…

Depuis que je suis devenue mère, j'ai le coeur mou. Moi qui était jadis forte et difficilement perturbable par les éceuilles de la vie, j'ai désormais l'impression d'être frappé en plein visage par un 10 roues chaque fois que j'entend des histoires tristes qui parlent d'enfants. La petite de deux ans dans l'incendie à Deschambeault hante encore mes nuits. Le fils de madame Lecompte aussi. Et bien d'autre.
Mais, par chance, j'ai aussi le coeur mou devant mon fils qui sourit, ma fille qui danse et veux encore se faire faire des couettes. Mon coeur fond, Littéralement. Ça fait peur, mais ça fait chaud.
Suis-je la seule à avoir le coeur mou?

Nadine a dit…

c'est une très belle expression «le coeur mou»... moi aussi!!! ;-)

Karocreations a dit…

Pour m'avoir boulverse c'est fait ! J'en ai entendu parle de ce texte, j'ai meme du requisitionne un magasine ! J'ai pleure comme une madeleine...Mon coeur de mere souffre. Mais c'est pas toujours facile...Comment trouver les mots justes avec nos enfants...

Karo

Julie a dit…

Mon enveloppe extérieure paraît bien aller. À l'intérieur d'elle, c'est le chaos total. J'essaye de ne pas le laisser paraître, je n'aime pas emmerder les gens avec mes bobos personnels. Depuis déjà 4 ans que je refoule états psychologiques, évenements boulversants et émotions, en me composant un visage joyeux qui ne l'est pas nécessairement. Est-ce que ce refoulement est malsain? Sûrement...

Anonyme a dit…

Ça serait tellement libérateur d'en parler, mais d'un autre coté, j'ai un peu honte...
Je suis acheteuse compulsive, je le sais, j'essaie de m'en sortir, mais c'est plus fort que moi... Je me fais plein de résolutions et pouf, elles partent. Je traine un solde sur ma carte de crédit (pas gigantesteque mais quand même, j'en ai honte).
Mon conjoint l'ignore. J'ai la chance d'avoir un emploi payant, mais je sais que je gaspille mon argent sur du linge cute cute cute pour mes enfants, mais ils n'en ont pas besoin.
Je n'ose pas en parler à mon conjoint, lui qui est tellement top budget... On a des comptes séparés, vous comprendrez, car je refuse de lui avouer mes problèmes...
J'aimerais tellement pouvoir "guérir"... J'ai honte d'hypothéquer ma vie ainsi...

J'ose croire que j'ai fait un pas dans la bonne direction dernièrement en contactant ma banque, en consolidant ma dette, et en réduisant ma limite de crédit drastiquement, mais ma carte est toujours dans mon porte-monnaie...

Un jour, j'espère, je serai guérie de ma "faiblesse".

Anonyme a dit…

Et à entendre et lire les femmes qui osent, ça nous aident à oser nous aussi, à se faire confiance, à assumer, à se responsabiliser et à partager, tout simplement!

Anonyme a dit…

À celle qui souhaite "guérir de sa faiblesse", tu sais, le moteur du changement, c'est la souffrance. Et tu sembles pas mal dedans. Pourquoi ne pas en profiter pour demander une aide extérieure? Tu te sentirais tellement libre après! Le pire est peut-être derrière avec un peu d'aide, qui sais... et tes enfants méritent bien une maman en plein posession d'elle-même. Allez courage! Bonne chance! Tu peux faire le pas! :-)

Anonyme a dit…

Il y a "le dire".
Il y a aussi "l'entendre".

Beaucoup de gens à qui on "le dit" ne veulent pas "l'entendre".

Malheureusement, le sous-texte de "comment vas-tu?" est souvent "dis-moi que ça va bien. Je ne sais tellement pas quoi te dire, si tu me dis que ça va mal, que... dis-moi que ça va bien".

Mais heureusement, d'autres personnes (j'en ai eu la preuve par la quantité phénoménale de commentaires de compassion, de force et d'espoir sur mon blogue) acceptent d'ouvrir leur coeur à quelqu'un qui ouvre le sien. Parfois, il suffit juste de dire "Je ne sais pas quoi te dire. Alors je vais me taire et je vais t'aimer". Mais, dans la vie, aimer, c'est probablement ce qu'il y a de plus difficile.

Anonyme a dit…

Le deuil d'un enfant dans n'importe quelles circonstances, c'est tabou. Certaines personnes ne comprennent pas pourquoi j'ai autant besoin d'en parler. Cet enfant a exister, et pour moi d'en parler c'est de continuer sa vie. Tout ce que ce drame peu avoir comme impact, sur la famille, sur soi...et sur un couple. J'aurais besoin non pas de le dire...mais de le crier.

Et aussi le choix de l'avortement. J'ai toujours été contre...mais parfois, la décision s'impose...malheureusement. Et je ne comprend pas qu,on doivent s'en cacher.

Puis, finalement, la dépression, peut importe sa forme et sa provenance.

Dire...ce n'est vraiment pas facile...parfois ça fait mal, pour nous ou pour l'interlocuteur...

C'est tellement dommage...

Marie
qui en aurait énormément à dire mais qui ne trouve personne pour l'entendre!

Evely a dit…

J'ai beaucoup de douleurs que je n'arrive pas encore à nommer. Les mots se bousculent, mais n'arrivent pas à sortir. J'écris souvent mes doux souvenirs. J'écris mes questionnements, mais rarement je parle de mes douleurs profondes. J'ai peur de les nommées, de leur donner une forme, une couleur, une texture.

J'écris parce que j'ai découvert que je ne suis pas seule, je vous lis parce que vous n'êtes pas seules non plus.

Souvent j'ai sentie vos présences et souvent je vous ai pris dans mes bras. Je crois sincèrement que les mots sont libérateurs et même si je n'ai pas encore écrit mes douleurs, c'est en vous racontant mes craintes, mes joies, mes peines et en lisant les votres qu'un jour j'y arriverais.

Au-delà des mères blogueuses, nous sommes une petite communauté de personnes qui se fond du bien par leur simple présence et leur ouverture les unes envers les autres

Evely a dit…

oups des erreurs... j'ai écrit avec mon coeur... pas ma tête... mea culpa

Nancy a dit…

Bonne précision que celle de Marâtre joyeuse! Moi, je n'ai aucun problème à dire mais plusieurs ont des problèmes à entendre. Il y a des personnes qui ne veulent pas l'entendre alors il faut accepter de jouer la carte de la légèreté et de ne pas leur en parler (et la plupart des gens recherchent la légèreté et ne veulent pas encombrer leur vie du malheur des autres!). Il faut en parler avec ceux qui sont capables d'aller au fond des choses et rigoler avec les autres (ça aussi, ça peut faire du bien).

Unknown a dit…

Ce soir, petit verre de vin rouge et chocolat noir à la main (plaisirs solitaires), j'ouvre enfin mon ordi après une trop grosse semaine et hop!

Je tombe sur ce texte...

Je suis surprise, émue, touchée et surtout, pas seule!

Merci Nadine, Marâtre Joyeuse, Chantal, Nancy, Mélanie, Evely, Marie-Julie, KaroCréations, Anne-Marie et toutes les autres.

* J'ai le coeur-mou moi aussi!

Pépine a dit…

Voici un extrait du prochain "Journal irrévérencieux d'une mère normale"... Je l'ai déterré pour la Marâtre joyeuse un matin de la semaine dernière...

Mes trente ans quand j’y repense…

24 septembre 2010

Une amie fête son trentième anniversaire aujourd'hui. Trente ans, ça fesse. Plus moyen de parler d'un jeune adulte. À trente ans, même si tu habites dans un deux et demi avec trois chats pi que tu passes tes soirées à jouer au Xbox, t'es un adulte quand même. C'est comme ça. Mon amie s'offre une soirée, elle a même engagé un band qu'elle apprécie pour bien marquer le coup. Tant qu'à fesser, autant le faire soi-même!

Les enfants sont à l'école. Il pleut. Je me retrouve seule et je repense à mes trente ans. Même en ayant beaucoup d'imagination, y'a peu de gens qui me battent au concours de l'anniversaire le plus pathétique de tous les anniversaires pathétiques. J'ai fêté mes trente ans à l'institut psychiatrique. (Lou étant un bébé insatiable et moi une mère dépassée par un post-partum foudroyant.)

Lou a donc habité quelques mois chez mes parents, l'Homme a fait semblant de continuer à vivre entre les visites où il me trouvait chaque fois plus résignée. J'avais désiré Lou, c'est indéniable. Je m'étais caressé la bedaine en chantant, trop heureuse de donner la vie, de m'inscrire dans l'histoire parmi celles qui l'avaient fait avant moi. J'avais quelque chose à apprendre. On ne peut pas tout faire tout bien et en toutes circonstances. Seule. Parce que c'est précisément ce qui a fait défaut à cette première expérience de la maternité. J'ai cru qu'en demandant de l'aide, je me portais coupable. J'ai pensé qu'en cherchant autour de moi d'autres bras où déposer ce petit paquet hurlant, je démontrais que je n'étais pas une bonne mère. Maintenant, je sais que si j'avais été une bonne mère, j'aurais pensé à Lou avant de craindre pour ma dignité ou mon orgueil. Voilà ce que j'avais à apprendre.

Avec la maternité viennent la peur, le doute et la fatigue. Lou aura donc pleuré 9 semaines après quoi, j'ai "abandonné". Ce qui s'est passé ensuite demeure vague mais je me souviens avoir eu honte. Vraiment honte. J'ai cru avoir échoué là où les autres arrivent à garder le cap. À l'institut, on m'a défaite pour mieux me refaire. Pendant un temps, j'ai oublié mon nom. Puis, graduellement et douloureusement, j'ai récupéré mon espace et mes responsabilités. La première année n'aura servi qu'à me prouver que j'étais capable. La deuxième à profiter d'un horizon dégagé avant l'arrivée de Gabrielle. (Si les gens qui m'entourent ont craint que je repasse par le même chemin, ils se sont bien gardés de manifester leurs appréhensions. Et pour être honnête, j'aurais su les rassurer.) Gabrielle a cimenté notre famille. Elle m'a permis de me "racheter". Ce que je n'avais pas eu l'occasion de faire pour Lou, je l'ai fait deux fois pour Gabrielle et c'est ainsi que j'ai passé six années à la maison à profiter d'une famille que j'avais eu peur de ne pas mériter. (Ne cherchez plus pourquoi le titre de "mère indigne" me fait cet effet!)

Je réalise que j'en dis peut-être trop. Tant pis. Si j'avais connu les histoires des autres (les histoires qu'on me raconte maintenant que je me suis généreusement répandue) j'aurais eu moins peur, moins mal et moins longtemps.

Pépine

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